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L’homme-fleur, une variété épanouie

« Des fleurs ? Pour le printemps ? Révolutionnaire… » Cette saillie à l’ironie mordante sort de la bouche de Meryl Streep, froide et terrifiante rédactrice en cheffe d’un grand magazine de mode dans Le diable s’habille en Prada (2006). Agacée que son équipe lui propose chaque année le même thème – la fleur, donc –, Miranda Priestly, son personnage, laisse ainsi échapper cette réplique devenue culte. Pourtant, s’il est un imprimé dont la mode ne semble pas se lasser, c’est bien celui-ci.
Historiquement, les imprimés floraux nous viendraient de Chine, berceau de la gravure sur bois (ou xylographie) développée dès le VIIe siècle. Importées par la fameuse route de la soie, les précieuses étoffes parsemées de pivoines séduisent les Européens, qui s’arrachent ces soieries chatoyantes. Ces dernières sont avant tout réservées aux femmes…
Il faut dire que, dans l’imaginaire collectif, la délicatesse des imprimés et leur caractère romantique s’accordent alors plus volontiers à la gente féminine qu’aux figures de la virilité. Exception faite de la Renaissance, où la dentelle vénitienne, composée d’élégants motifs floraux, sera adoptée avec enthousiasme par les nobles et les bourgeois.
Au XXe siècle, la chemise hawaïenne permettra aux hommes de porter des fleurs. Si ses origines sont incertaines – on dit qu’elle aurait été importée par les migrants japonais venus à Hawaï servir de main-d’œuvre dans les plantations de canne à sucre –, elle habille les icônes du grand comme du petit écran : Elvis Presley dans Sous le ciel bleu d’Hawaï (1961), Tom Selleck dans la série Magnum, Al Pacino dans Scarface (1983) ou encore Leonardo DiCaprio dans Roméo + Juliette (1996).
Côté musique, les adeptes du Flower Power se sont emparés de l’imprimé floral sans s’encombrer des normes de genre, mais c’est surtout Kurt Cobain qui va le rendre subversif en arborant à l’envi de délicates robes fleuries. « J’aime porter des robes parce qu’elles sont confortables, avait ainsi déclaré le leader de Nirvana lors d’une interview accordée à la revue britannique Melody Maker en décembre 1992. On se sent à l’aise, sexy et libre en portant une robe. C’est amusant. »
Le rockeur appuiera ses dires en posant, barbu et maquillé, vêtu d’un modèle fleuri, bleu, blanc et rose, à manches courtes et petits boutons, en couverture du numéro de septembre 1993 de The Face. Aujourd’hui, les fleurs font partie de ces imprimés indémodables retravaillés saison après saison. Charge à chacun de trouver la variété qui lui plaît.
Margaux Krehl
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